La musette baroque

La musette fait parti de la famille des cornemuses. C'est vers le début du 17 siècle que cet instrument apparaît avec ses caractéristiques propres qui la distingue de d'autre types de cornemuses: Muni d'un sac rempli au moyen d'un soufflet (et non pas à la bouche) que l'on attache à l'avant bras, d'un chalumeau à anche double et à perce cylindrique (qui ne permet pas d'octavier) et de bourdons multiples (anches doubles) intégrés dans un bloc cylindrique à perces multiples (pliage de la colonne d'air pour permettre des notes graves tout en réduisant les dimensions des bourdons; cet arrangement est similaire à celui d'un instrument renaissance nommé le cervelas (rankett) qui est un des précurseurs du basson).

 

Musette Lissieu, Lyon 1695
 La musette fut au 17ème siècle surtout employé pour les musiques dites champêtres, c.à.d. des airs de bergers, airs populaires etc
ce qui lui valut un certain dédain étant classée comme instrument quelque peu primitif et lassant similaire à l'image de marque de la
vielle. Or, l'évolution de la musette contredira cette appréciation.

Receuil d'airs sérieux et à boire, 1716:

"Chantez tendrement ma Musette,
Chantez l'amour de mon berger.
Et que vos doux sons nous repettent
Qu'il est charmant de s'engager."

 

Mr. l'Abbé Carbasus dans une lettre daté 1739 parlant des musettes et des vielles:

"... tout le bruit qui les accompagne est un charivari continuel.. un croacement de grenouilles ... un ronflement de la rouë d'un coutelier ou d'un tisserand ...un équipage d'un mulet ..."

Le chroniqueur du Mercure de France, 1757:


"Je me garderai bien de passer sous silence la musette et la vielle, quoique ceux qui logent dans le voisinage soient beaucoup plus que moi en état de les apprécier. Je serois bien fâché d'indisposer contre moi la multitude des ses partisans, en ne rendant que foiblement justice à deux instruments à la mode.... La musette, dans sa parure, efface tous les autres instrumens; aucuns ne lui peuvent disputer l'avantage des pompons, des franges & des rubans. Elle est consacrée aux fêtes champêtres, & en couleur de rose, ainsi que la vielle, elle ne sort jamais des tons de C sol ut, & de G ré sol: cetter persévérance ne seroit-elle point l'image de la constance des bergers ?"


En 1672 une première méthode de la musette fut publiée (par Borjon de Cellerie) suivi en 1738 de la méthode de Hotteterre dit le Romain. C'est ouvrage (aujourd'hui réédité en facsimile) reste la référence unique pour l'apprentissage de l'instrument. Au début du 18ème siècle, non seulement la musette fut reprise comme instrument d'orchestre (pièces instrumentales, opéras, accompagnement de chant), mais il connut aussi une popularité extraordinaire notamment à la cour et parmi les musiciens attitrés (Lully, Rameau). D'autre part, une littérature abondante fut créée (Hotteterre, Boismortier, Chédeville, Couperin, etc.) et des facteurs (p.e. Chédeville) apportèrent des modifications révolutionnaires pour l'époque, en prévoyant des clés pour augmenter la tessiture mais aussi pour permettre le jeu sur une gamme chromatique. On peut considérer la musette comme le précurseur des instrument à clés comme la flûte, la clarinette etc.. Finalement, l'adjonction d'un deuxième chalumeau permit l'élargissement de la tessiture jusqu'à plus de deux octaves.

 

La musette connut l'apogée de sa popularité entre 1720 et 1740 environ, période pendant elle dépassa le violon et sans doute la flûte comme instrument à la mode. Au même moment, la vielle à roue, instrument à bourdon souvent assimilé (et critiqué !) pour son expression musicale similaire, gagna en popularité. Vers 1760, la musette tomba rapidement dans l'oubli. Il n'existe aujourd'hui que quelques rares facteurs qui ont réalisé des instruments à partir d'instruments conservés dans des musées. L'intérêt renouvelé pour la musique baroque de notre époque a révélé la musette.


Musette Chédeville du 18ème siècle


Le caractère musical de la musette est unique et offre en fait un instrument aux possibilités musicales insoupçonnées, mais aussi extrêmement difficile à jouer. En effet, très sensible aux variations de pressions du "vent" qui agit différemment sur les anches des chalumeaux et des bourdons, il faut acquérir une maîtrise parfaite du contrôle de la pression au risque de sonner faux. Se jouant avec un doigté fermé (voir chapitre sur les cornemuses), les articulations (lié, détaché, staccato; les ornementations comme les "battements, tremblements, coulements, porte-voix, flattements" etc.) sont réalisés par les doigts et leur micro mouvements. Bien que faible en volume, la musette possède un son tellement caractéristique qu'elle arrive à se faire entendre seule parmi les instruments d'un orchestre baroque complet ou par rapport à une basse continue ou le chant. L'individualité de son caractère rend la musette difficile à intégrer comme instrument universel comme le violon ou la flûte, elle garde une individualité incontournable. C'est pour cela que dans des opéras baroques, la musette est utilisée de façon sporadique dans quelques mouvements seulement.

 



Musette baroque fabriquée par Remy Dubois, Verviers (Belgique), copie Chedeville

 retour descriptions instruments

fonctionalité de la musette
 exemple musical

 retour homepage